Par Alexandra Poirier
M.SC., Ps.éd.

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Que l’on soit parent, enseignant, intervenant ou même éducateur, la frénésie qui entoure les diagnostics chez nos enfants est une réalité inquiétante. En début d’année scolaire, on épluche nos dossiers ou nos inscriptions, pour en apprendre davantage sur les petits trésors avec qui nous travaillerons! TDA/H, TOC, TSA, Dyspraxie, TOP… Pour la plupart des gens, c’est du chinois… une succession de lettre qui ne veut rien dire! Pour nous, c’est un jargon que l’on connaît bien et avec lequel nous devons composer tous les jours! Nous devons lire sur le sujet et connaître les interventions efficaces à utiliser afin de bien répondre aux besoins de nos petits trésors!

En tant que psychoéducatrice, je rencontre plusieurs parents et intervenants dans le cadre de mon travail. Certains d’entre eux sont à la recherche d’un mot, qui pourrait enfin expliquer leurs maux. Au regard de la société, ce mot, cher diagnostic, peut paraître bien illusoire… parfois même appelé étiquette. Mais, aux yeux des parents qui vivent une situation particulière avec leur enfant, ce mot vient apaiser la peur, l’incompréhension et les questionnements qui les tourmentent. Pour eux, ce mot vient répondre aux nombreux « pourquoi » qui emplissent leurs têtes! J’entends aussi plusieurs mythes qui entourent les différents diagnostics qui sont donnés chez la jeunesse d’aujourd’hui.
– « Dans notre temps, y’en avait pas de ça! Les enfants qui étaient actifs travaillaient dehors, pis ça faisait l’affaire ».
– « Les parents font juste ça pour avoir des pilules ».
– « L’école fais tout pour que je fasse diagnostiquer mon enfant, ils veulent seulement qu’il soit tagger dans la cour d’école ».
Dans ce tourbillon d’idées et de préjugés, certains questionnements demeurent : est-ce que c’est « à la mode » de poser des diagnostics chez les enfants? Où est-ce que la société n’est tout simplement pas adaptée aux enfants ayant des difficultés particulières?

« C’est juste au Québec qu’on diagnostique de même… »

C’est une inquiétude fréquente chez les parents et chez les intervenants d’avoir l’impression qu’on a le « diagnostic facile au Québec ». Si je vous dis TDA/H, qu’est-ce que cela signifie pour vous? Il s’agit du Trouble Déficitaire de l’Attention avec ou sans Hyperactivité. On en entend parler un peu partout : à l’école, dans les réunions parents-enseignants, à l’aréna pendant la game du p’tit…
En prenant cette problématique en exemple pour le bien de ce billet, il est nécessaire de dire que l’état des connaissances actuelles démontre un taux de prévalence uniforme de TDA/H à travers le monde, oscillant entre 5 à 7%. Il y toutes les raisons de croire que ce pourcentage fut le même à travers les époques et les nations. Par ailleurs, il n’est pas aussi facile d’aboutir à un diagnostic, à défaut de ce que la majorité des gens pensent. La conclusion diagnostique du TDA/H résulte d’une analyse rigoureuse, à des observations systématiques et à la passation de tests standardisés, et ce, pris en charge par des professionnels de la santé. Le choix d’apposer un diagnostic ou non se fait essentiellement en respectant les critères du DSM-IV, Dictionnaire de Santé Mentale.
Malheureusement oui, il peut être possible que les problématiques ne soient pas toujours bien diagnostiquées. Il s’agit ici de faux diagnostic et c’est pour cette raison qu’il ne faut pas seulement se fier à nos impressions et à quelques symptômes du quotidien.

Et le milieu scolaire dans tout ça?

Afin de permettre aux commissions scolaires d’organiser les services d’enseignement, complémentaires et spécialisés, le Ministère leur alloue diverses sommes afin d’offrir des services adaptés aux enfants avec des besoins particuliers. Il s’agit de la fameuse cote, qui donne accès à des effectifs et à des budgets supplémentaires. Ces cotes font référence à différents diagnostics dans le spectre de la santé physique et psychologique :
– troubles graves du comportement
– déficience intellectuelle
– déficience motrice
– déficience organique
– déficience langagière
– déficience visuelle
– déficience auditive
– trouble du spectre de l’autisme
– troubles relevant de la psychopathologie

Malgré les croyances, il n’est pas dans l’intérêt du milieu scolaire de mettre de la pression sur les parents pour obtenir un diagnostic. Certes, cela rime avec « budget », mais l’équation n’est pas si simple! Encore une fois, une évaluation rigoureuse est nécessaire avant d’aboutir à un diagnostic chez l’enfant. Et cette évaluation ne se résume pas seulement aux observations de l’enseignante et du personnel scolaire! En partenariat avec les CISSS, plusieurs professionnels peuvent être interpelés afin de donner leurs impressions cliniques en lien avec des difficultés vécues chez les enfants.
Certains penseront qu’avec la société d’aujourd’hui, où tout rime avec rentabilité et que tout roule sur un rythme effréné, l’adaptabilité, la flexibilité et la créativité ne peuvent pas coexister auprès d’un enfant avec des différences. Moi, je dis qu’il s’agit de la responsabilité de chacun d’entre nous de faire vivre cette possibilité à travers le quotidien des enfants.

Je crois encore aux perles de notre système d’éducation, celles sans qui le quotidien de certains enfants serait gris. Je crois aux parents, aux éducatrices en petite enfance, aux enseignantes, aux intervenantes qui font tout en leur pouvoir pour faire briller le quotidien de ces chers petits trésors!

Bonne rentrée à vous tous!
Alexandra Poirier
Psychoéducatrice

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Références:
Polancyk et al., Am J Psychiatry, 2007 dans B. Hammarrenger, TDAH Trouble de déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité.
L’organisation des services éducatifs aux élèves à risque et aux élèves handicapés ou en difficulté d’adaptation et d’apprentissage (EHDAA), Gouvernement du Québec, 2007.