Par Marie-Eve Gobeil – Psychoéducatrice – Clinique Brainstorm
On entend de plus en plus parler de douance. Certaines personnes croient en une nouvelle mode, alors que le concept existe depuis longtemps et il est reconnu et étudié dans plusieurs autres pays.
Pour simplifier le texte, j’utiliserai le terme douance, puisqu’on entend aussi les termes haut potentiel, HPI, surdouance, multi potentiel…, pour lesquels il n’y a pas de consensus. Certains spécialistes font des différences entre ces appellations, alors que d’autres, non. Il est donc tout à fait compréhensible de ne plus s’y retrouver!
Au Québec, on recommence à s’intéresser au sujet depuis quelques années, après qu’on l’a délaissé à la fin des années 70, à la suite de la réforme en éducation. Dans le courant de cette réforme scolaire, on parlait (légitimement) d’accompagnement d’élèves en difficulté. Ce n’était donc pas compatible avec la douance, qui est encore aujourd’hui souvent perçue (à tort) comme de l’élitisme. Pourtant, les besoins des élèves doués sont aussi éloignés de la moyenne de la population que ceux des élèves avec une déficience intellectuelle.
Il est d’autant plus normal d’être perdu dans ce domaine, puisqu’il n’y a pas de consensus scientifique sur la définition elle-même. Selon un courant de pensée, pour avoir une conclusion de douance, il doit y avoir présence d’un quotient intellectuel homogène de 130 ou plus (environ 2% de la population), alors que pour un autre courant de pensée, il s’agit d’un QI de plus de 120, accompagné de certaines caractéristiques au niveau du fonctionnement quotidien (environ 5 à 10% de la population).
La douance n’est pas un diagnostic, puisqu’elle ne fait pas partie des troubles de santé mentale. IL s’agit même d’un facteur de protection. On parle plutôt de neurodiversité (un mode de fonctionnement du cerveau différent). Cependant, la douance peut être présente chez des personnes ayant un diagnostic autre (TDA-H, TSA, Dys, anxiété, trouble du langage, SGT…). C’est ce qu’on appelle la double exceptionnalité ou le « Twice exceptionnal ».
L’évaluation devient alors plus complexe, puisque l’enfant peut camoufler les manifestations de son trouble avec ses capacités supérieures ou sa douance peut être camouflée par les effets de son trouble en comorbidité. Il devient alors difficile d’identifier et le trouble, et la douance. L’enfant n’a donc pas réponse à ses besoins dans aucune de ses particularités. Ce sont les psychologues et les neuropsychologues qui peuvent conclure à une douance, à la suite d’une évaluation du QI et du fonctionnement de la personne.
Contrairement à la croyance populaire, la douance n’est pas synonyme de réussite scolaire. On peut d’ailleurs voir des signes de douance dès la petite enfance. Un des critères pour une conclusion de douance est le fait que ces enfants ont généralement un développement précoce. Le développement précoce peut toucher toutes les sphères.
Voici quelques caractéristiques qui devraient vous mettre la puce à l’oreille. Attention, chaque enfant est différent. La douance peut s’exprimer de façon différente chez chacun ou dans certains contextes uniquement.
Sphère affective :
- Hypersensibilité émotive
- Présence d’anxiété
- Grande empathie
- Perfectionnisme
- Sentiment de justice
- Peurs non conventionnelles pour l’âge
Sphère sociale :
- Sensible au jugement
- Indifférent à l’autorité
- Sens de l’humour
- Compétitivité
- Besoin de contrôler, décider
- Esprit critique développé
- Préfère la présence des plus vieux ou des adultes
- Conflits avec les pairs de son âge
Sphère physique :
- Hypersensibilités sensorielles
- Besoin de stimulation
- Bonnes habiletés physiques
- Difficultés graphiques ou d’élocution
- Sommeil perturbé
Sphère cognitive :
- Langage développé (complexe dès un jeune âge)
- Fait des liens de cause à effet impressionnants pour son âge
- Besoin de comprendre, questionne beaucoup
- Besoin que le cerveau soit occupé
- Besoin de complexité
- Créativité
- Autodidacte
- Excellente mémoire
- Capacité d’observation très grande
Ces enfants peuvent paraître comme de petits adultes ou faire des crises qu’on s’explique mal, car ils semblent comprendre tellement de choses habituellement… Un mot qui revient souvent pour décrire ces enfants est : INTENSITÉ!
On peut se laisser avoir par le décalage entre le fonctionnement cognitif (plus développé que son âge chronologique) et la maturité affective de l’enfant (au même niveau que les enfants de son âge). On a alors de la difficulté à comprendre leurs réactions, qu’on trouve démesurées. Ces enfants demeurent des enfants et on doit répondre à leurs besoins dans chacune des sphères de leur développement.
Le sujet est assez complexe, mais si vous vous questionnez sur le sujet, n’hésitez pas à faire appel à un professionnel qualifié. Il existe aussi plusieurs ouvrages, balados et documentaires sur le sujet.
Pour en savoir plus sur le sujet, vous pouvez visiter le site web de la clinique Brain Storm https://cliniquebrainstorm.com/